L'essentiel à savoir sur la dépression
Apprendre à démystifier les idées reçues sur la dépression afin de mieux comprendre cette maladie et savoir comment se faire aider.
La dépression, qu'est-ce c'est?
La dépression se caractérise essentiellement par une perte du sens de la vie qui va de pair avec un manque de plaisir à vivre. Elle peut aller jusqu’à la mélancolie et au suicide.
Les professionnels de la santé mentale définissent la dépression, ou épisode dépressif caractérisé (terme médical), comme un "trouble de l'humeur" présentant des symptômes communs, tels que la tristesse, la culpabilité, la perte de plaisir, les troubles du sommeil, l'apathie, la fatigue et le retrait social. L'épisode dépressif caractérisé affecte également les fonctions cognitives (troubles de la concentration, de la mémoire, de la motivation) et les fonctions dites instinctuelles (appétit, sommeil, libido).
La dépression est une maladie. Ce n'est pas juste un état apathique dû à un manque de volonté, ou un sentiment passager de tristesse et de fatigue lié aux aléas de la vie. C'est une condition médicale dont on fait un diagnostic clinique précis, et qui doit être soignée.
Les symptômes d'un épisode dépressif caractérisé sont présents durant une période minimum de deux semaines à un degré de sévérité aigu, et représentent un changement majeur par rapport au fonctionnement normal (professionnel, social, familial).
Les chiffres de la dépression
En 2004, l'Organisation mondiale de la santé a déclaré que la dépression était la quatrième cause de souffrance humaine et d'invalidité, derrière le cancer, les maladies cardiaques et les accidents de la route. En 2021, la dépression a été déclarée première cause de souffrance humaine et de handicap. Dans tous les groupes démographiques, les chiffres augmentent.
Le plus souvent observée dans la tranche d'âge 25-45 ans, la dépression croît le plus rapidement chez les enfants et les adolescents. De 2015 à 2020, les prescriptions d'antidépresseurs ont augmenté de 40% chez les adolescents, contre 15% chez les adultes. Les visites aux urgences pour des pensées suicidaires ont augmenté de 59% de 2016 à 2021.
En France, le Baromètre Santé mené en 2021 par Santé publique France montre que 12,5% des personnes âgées de 18 à 85 ans auraient eu un épisode dépressif caractérisé au cours des 12 mois précédant l’enquête. Cette augmentation concerne tous les segments de population analysés. Le taux est plus élevé chez les femmes que chez les hommes (15,6% contre 9,3%), quel que soit l’âge. Les épisodes dépressifs ont connu « une accélération sans précédent entre 2017 et 2021 (+ 36%), en particulier chez les jeunes adultes » observe cette étude : ils ont touché 1 jeune adulte sur 5 (20,8%) en 2021, soit une hausse de près de 80% par rapport à 2017 (11,7%).
En moyenne, chaque personne déprimée affecte négativement au moins 3 autres personnes.
La dépression est-elle héréditaire?
La dépression n’est pas une maladie héréditaire, elle ne se transmet pas génétiquement. Cependant, on estime qu’une personne dont l’un des deux parents a souffert d’un épisode dépressif majeur présente 2 à 4 fois plus de risques d’être dépressive que la population générale. On parle alors de prédisposition.
La dépression peut être transmise par les parents dépressifs à leurs enfants en grande partie par le biais de leurs interactions, c'est-à-dire les modèles que les parents donnent involontairement dans leurs valeurs et leur vision des choses, y compris la manière dont ils font face à l'adversité, gèrent et résolvent les problèmes, et entretiennent des relations avec les autres.
Quelles peuvent être les conséquences de la dépression?
La dépression est bien plus qu'un simple trouble de l'humeur et qu'un ensemble de symptômes. Elle affecte votre capacité à penser et à prendre des décisions. Elle affecte les performances professionnelles, la concentration et la capacité à fonctionner dans le cadre de son travail. Elle affecte les relations. Il est difficile de côtoyer des personnes déprimées. Cela finit par nuire aux relations, et bien sûr, tout ce que cela entraîne, c'est plus d'isolement et plus de dépression.
Une dépression non traitée peut s'aggraver, devenir chronique, et conduire à des pensées suicidaires. L’hospitalisation peut être décidée lorsque le patient souffrant d’un trouble dépressif présente un risque suicidaire élevé. L’hospitalisation permet d’éviter le passage à l’acte et d’opérer un réajustement du traitement en cas de récidive.
Quels sont les facteurs qui conduisent à une dépression?
Il existe un ensemble de facteurs qui sont impliqués dans l’apparition des troubles mentaux, et qui ne peuvent être considérés isolément : la biologie (avec notamment la génétique et l’épigénétique), la psychologie, l’environnement, le contexte, la situation de vie, l’histoire personnelle, le social. Tous ces facteurs jouent sur l’apparition et le développement des troubles et interagissent: des paramètres environnementaux pouvant parfois engendrer des troubles qui ont des conséquences biologiques.
La dépression est souvent considérée comme la conséquence d'événements extérieurs. Cependant, certaines personnes qui ont été confrontées à des traumatismes violents ne souffrent pas de dépression parce qu'elles ont acquis des capacités d'adaptation et des schémas d'auto-organisation.
Ce qui compte, c'est moins ce qui nous arrive réellement que la manière dont nous interprétons les événements de notre vie, la signification et le sens que nous leur donnons.
Le stress affecte la façon dont nous prenons des décisions qui compliquent une dépression et l'exacerbent. Sans être fait intentionnellement, cela témoigne d'un déclin de la qualité des stratégies de prise de décision, et amène à commettre des erreurs de jugement.
L'humeur influence la façon dont on se souvient de ce qui nous arrive et la qualité des choix que l'on fait. Notre état d'esprit influence nos perceptions et la qualité des décisions, et aider les patients à prendre de meilleures décisions en modifiant le processus mental est l'une des choses les plus importantes à faire dans un travail thérapeutique.
Comment traite-t-on une dépression?
Existe-t-il un meilleur traitement pour la dépression ? Absolument pas. Existe-t-il une meilleure approche ? Absolument pas. La meilleure approche est celle qui fonctionne pour l'individu.
La forme de traitement la plus courante est le médicament antidépresseur. Pour environ la moitié des personnes qui prennent des antidépresseurs, les symptômes diminuent de manière significative après quelques semaines. Les antidépresseurs peuvent vous aider à gérer les symptômes végétatifs, tels que les troubles du sommeil et de l'appétit, et ils peuvent faire baisser le niveau de la dépression. Mais ils ne sont pas sans effets secondaires et ne devraient pas être pris sur le long terme et sans une aide thérapeutique.
Aucun médicament ne vous aidera à développer des compétences en matière de gestion du stress. Aucun médicament ne vous aidera à établir et à maintenir des relations positives avec d'autres personnes ou à développer des compétences cognitives qui vous aideront à réfléchir de manière critique à l'expérience au lieu de vous laisser entraîner par vos émotions. Un antidépresseur ne va pas vous aider à accepter les évènements destructeurs qui se sont produits dans votre vie, ni vous aider à vous reconstruire. L'une des choses les plus importantes dans un traitement thérapeutique est d'apprendre à reconstruire un avenir convaincant.
Pour diminuer les symptômes du trouble dépressif, la thérapie psychanalytique ou psychodynamique et la thérapie cognitivo-comportementale ont des effets prouvés.
La thérapie cognitivo-comportementale apporte des techniques pour la gestion des symptômes de la dépression (sommeil, stress, etc.). Elle aide aussi à corriger les schémas de pensées négatives.
Le travail psychanalytique dans les dépressions tend à rechercher une transformation du fonctionnement psychique qui modifie en profondeur les aspects mentaux qui ont fait le lit de ces dépressions. La thérapie psychanalytique met le focus sur les phénomènes inconscients de vie passée et actuelle ainsi que sur les ressentis. Grâce à une meilleure connaissance de son histoire, le patient se dirige vers une acceptation de soi et un soulagement de la souffrance psychique.
Le psychanalyste possède également, et c’est très important dans les dépressions, un outil d’évaluation unique et essentiel de la profondeur et de la gravité de celles-ci, absolument original, grâce à la conception d’un psychisme complexe, formé de trois instances, doté d’une structure, d’une forme de pensée, d’une organisation défensive, d’une part inconsciente beaucoup plus importante que celle qui est consciente, et d’un conflict intérieur propre à chaque individu. Autrement dit, la psychanalyse se penche sur ce qui serait nécessaire pour permettre un changement vraiment durable.
Comment se faire aider si l'on est atteint de dépression?
Lorsqu'on est en train de se noyer, toute bouée est bonne à attraper. Il ne faut négliger aucune aide.
Les antidépresseurs, qu'un médecin peut prescrire, peuvent vous aider à sortir la tête hors de l'eau dans un premier temps et à retrouver votre capacité à penser et à agir, mais ils doivent être associés à une psychothérapie pour que vous ayez une chance de traiter les causes psychologiques.
Il est important d'obtenir l'aide d'un professionnel. Vous ne connaissez pas vos propres zones d'ombre. L'objectif n'est pas de guérir la dépression mais d'apprendre à gérer ses humeurs et à changer la manière d'interpréter les événements de sa vie.
L'une des compétences les plus importantes que vous puissiez développer est l'épreuve de la réalité. Comment sortir de soi-même pour savoir ce qui se passe réellement ? Si vous observez les moments où les gens ont le plus de problèmes, c'est lorsqu'ils s'enferment dans des croyances qui sont déconnectées de la réalité. Les cliniciens appellent cela la rigidité cognitive. Le principal problème des personnes déprimées est qu'elles pensent certaines choses et commettent ensuite l'erreur de croire en leur propre raisonnement, devenant victimes des émotions négatives qui en découlent.
Le rôle d'un psychothérapeute est d'aider le patient à acquérir les compétences cognitives nécessaires pour recueillir des informations et les utiliser au mieux au lieu de s'appuyer sur des conclusions infondées.
Une dépression peut aussi avoir des causes archaïques longtemps réprimées et exilées dans l'inconscient, qui refont surface sous forme de symptômes. Dans ce cas, une thérapie analytique peut permettre de mettre en évidence l'origine des souffrances pour mieux les comprendre et apprendre à les gérer.